De sudouest.frLes patrons d’Intermarché, à Coulounieix, et du Bassin, à Périgueux, ont acheté une vache, pour la servir à leurs clients. Et mieux défendre leurs métiersDaisy, lors du Salon de l'agricultureRomuald Plantady, ce lundi, dans son supermarché. Sa vache Daisy a reçu le second prix au Concours général agricole Après le cheval anonyme camouflé dans une boîte surgelée, voici la vache dont on sait tout avant de l’assaisonner. La blague de copains qui fêtent l’anniversaire de leur affaire devient presque un message politique, la crise dite des lasagnes ayant fusillé le métier de boucher industriel, en pleine mode des locavores : avec Daisy, au moins, on sait qui vient dîner.
Une belle fillette de cinq ans, élevée dans la Creuse, 980 kilos et une médaille de championne - madame a terminé deuxième au Concours général agricole, il y a 15 jours, dans la catégorie vénérée des bouchères Limousines -, pas une carcasse hachée, à la traçabilité floutée à force d’intermédiaires, basques ou roumains. Déjà, des clients du supermarché de Coulounieix se sont amusés à menacer le patron d’une pétition pour sauver Daisy. Les autres font la queue pour en manger, de ce symbole… incarné.
« On aime la bonne bouffe »
Romuald Plantady, repreneur d’Intermarché à Coulounieix-Chamiers, et Jean-François Lannet, créateur d’Au Bassin, le restaurant de ce quartier en devenir au bord du canal de Périgueux, ont acheté Daisy au Salon de l’agriculture, environ 6.500 euros aux enchères. Tous deux cherchaient une façon de marquer leur installation dans l’agglomération au même moment, en avril 2012. « Nous avons le même état d’esprit, même si nous avons deux métiers différents », explique Romuald Plantady, 38 ans. « On est simples, on aime la bonne bouffe et on veut fournir la meilleure qualité au prix le plus bas. » Un jour que Romuald déjeunait avec son fournisseur de viande chez Jean-François, l’idée est tombée, d’abord pour rire : acheter une vache vedette, dans la plus grande boucherie du pays. « On vendait des Mercedes, là, c’est une Porsche », sourit le patron du supermarché, qui ne multipliera pas le prix de l’engin.
550 kilos de viande
Daisy sera partagée dans le sens de la longueur, entre le rayon boucherie et le restaurant.
Déshabillée, elle propose 550 kilos de viande à « valoriser », de l’entrecôte au jarret. On pourra même voir sa photo avant de déguster. Quitte à risquer l’attachement anthropomorphique ? « Il y aura peut-être des défenseurs, qui diront qu’on l’a un peu trop humanisée », réfléchit Romuald Plantady. « Mais dans une boucherie, on vend des vaches. » Et ce n’est pas anodin de le rappeler ces jours-ci.
Car, au fond, les deux commerçants ne font que leur métier : choisir un animal d’origine tracée sans se perdre dans une farandole de négociants, « c’est ce qu’on fait tous les jours ». Daisy incarne cela, la pratique d’une boucherie artisanale dans une grande surface (pour Romuald Plantady) et la garantie du cuisiné sur place (pour Jean-François Lannet).
« On produit nos produits »
De quoi défendre sa boutique (« On ne le dit pas assez, mais Intermarché produit ses produits, nous sommes nos propres garants » de l’origine de la viande) et démonter la polémique en cours (« Quand on multiplie les intermédiaires, comment concevoir qu’on peut payer moins cher ? ») Tout en louant cette démarche d’avoir sympathisé avec les (jeunes) éleveurs de Daisy, dans un échange direct entre distributeurs et producteurs.
Daisy a déjà fait des malheureux (il a fallu « expliquer aux enfants qu’on ne la mettra pas dans le jardin »), mais fera plaisir aux gourmets d’ici 15 jours. Pour le moment, elle se refait un peu de viande à domicile, après avoir perdu 50 kilos au Salon, entre stress des caresses et chaleur de cette grande exposition rurale. Elle sera prête le 26 mars, pour les tablées du week-end de Pâques. Il faut réserver car il n’y en aura pas pour tout le monde.
En attendant, il y a peu de raison de pleurer sur le sort de Daisy : « C’est le destin de toutes les vaches bouchères », dit Romuald Plantady, lui aussi un pur produit du Limousin.
Source : http://www.sudouest.fr/2013/03/12/avec-daisy-au-moins-on-saura-ce-qu-on-mange-991620-4720.php