De sudouest.frDes bénévoles de la LPO se consacrent à la protection des nids de busardsPierre observe le jeune busard qui prendra bientôt son envol. (photo dr) Pierre étire l'aile de l'oisillon et la mesure. Tableau de conversion en main, Elisa annonce : « Il a 20 jours. » Dans un peu plus d'une semaine, le jeune busard prendra donc son envol. Il quittera ce nid à haut risque établi en plein champ de blé entre Nieul-sur-Mer et Marsilly pour apprendre à voleter, planer, se poser, repartir, chasser.
À haut risque parce que sans la vigilance des bénévoles de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et la complicité de l'agriculteur qui exploite les terres, Rodolphe Chavignay, les cinq jeunes rapaces auraient été déchiquetés vivants par les mâchoires de la moissonneuse-batteuse.
La grande faucheuse, au sens propre du terme.
Car la nature est ainsi faite que les couples de busards cendrés choisissent les cultures pour nicher sans se préoccuper du calendrier des agriculteurs qui fauchent fin juin, début juillet. Et du haut de la moissonneuse, difficile de distinguer cinq ou six poussins cachés dans les blés.
Passages de proie
« On cherche d'abord les anciennes colonies puis on repère les couples en vol aux jumelles, notamment les spectaculaires scènes de passages de proie aériens entre le mâle et la femelle. Il suffit ensuite de suivre la femelle pour repérer le nid », explique Pierre, bénévole de la LPO.
L'an dernier, il était étudiant et travaillait déjà sur la protection des nids de busards, comme Elisa et Chloé cette année. Claudine, elle, est retraitée. « Je vivais à Paris. J'ai pris ma retraite pour me consacrer à la protection des oiseaux. » Tous les quatre se sont mobilisés depuis le début des moissons pour repérer les quelque 65 nids de busards cendrés déjà recensés entre la Plaine d'Aunis et le Marais poitevin. Leur campagne dure deux semaines. La même opération est réalisée dans le marais de Rochefort par les spécialistes du CNRS (1).
Bottes en caoutchouc pour ne pas ouvrir la piste aux prédateurs (2), approche silencieuse et prudente : les ornithologues clôturent d'abord le mètre carré où se trouve le nid avant de compter et de mesurer les petits. Une fois la parcelle protégée, l'agriculteur peut faucher tout autour. « Ici, il a même fait mieux que ça puisqu'il a laissé un grand espace tout autour de la clôture afin que le nid soit encore mieux protégé », se réjouit Claudine, tandis que les cinq jeunes busards ouvrent leur bec crochu pour se défendre. Sans la bienveillance des agriculteurs, il n'y aurait pas de protection possible. « Notre mission pédagogique consiste à leur expliquer, s'ils ne le savent déjà, que le busard est un allié de l'agriculture, puisque 95 % de son alimentation est constituée de campagnols », poursuit Pierre.
Une fois que l'opération de protection et de recensement sera terminée, la femelle reviendra nourrir ses petits jusqu'à ce qu'ils volent de leurs propres ailes. En juillet-août, ils iront se regrouper en dortoir sur les mizottes d'Esnandes ou de Charron, avant d'entamer aux premiers jours de septembre leur longue migration vers l'Afrique occidentale.
(1) Centre national de la recherche scientifique. (2) Le caoutchouc laisse moins d'odeurs.
Source : http://www.sudouest.fr/2012/07/03/les-dents-de-la-terre-759880-4720.php