De charentelibre.frDe La Palmyre au Rwanda, Florence Perroux et Sébastien Meys partagent une même passion pour les gorilles. À leurs yeux aussi impressionnants que pacifiques. Ils viennent de cosigner un livre sur leurs protégés.Le photographe animalier et sa compagne ont fait le plein d'images talentueuses que l'on peut découvrir dans leur ouvrage «Gorilles, portraits intimes». Repros CL En hiver, les gorilles sont à couvert, dans leur enclos chauffé du zoo de La Palmyre à côté de Royan. Lorsque Sébastien Meys vient chercher sa compagne Florence Perroux, chargée de communication et pédagogie du zoo, il ne manque pas d'aller saluer Yola, Bongo, Ybana et leurs petits. «C'est curieux, je les sens presque comme des cousins, de la famille éloignée mais c'est à sens unique! Eux n'ont aucun besoin de me voir et c'est très bien comme ça.» Lucides, Florence Perroux et Sébastien Meys n'attendent rien des gorilles auxquels ils consacrent pourtant beaucoup, passionnément depuis plusieurs années. «À la différence des chimpanzés ou des orangs-outangs plutôt démonstratifs, les gorilles sont réservés, timides. Un peu comme moi», avoue Florence Perroux, qui se méfie pourtant de toute forme d'anthropomorphisme, cette façon de prêter aux animaux des sentiments humains.
«Ils ont chacun leur personnalité»
Titulaire d'un diplôme en communication scientifique, Florence Perroux a fait ses débuts professionnels en tant qu'attachée de presse au zoo de Vincennes (1). «Jeune, je me sentais très concernée par les atteintes à l'environnement, la déforestation, la disparition des espèces. J'avais l'impression que peu de gens autour de moi s'en souciaient.» Plus tard, elle a travaillé pour la commune de Saint-Martin-Vésubie dans le Mercantour, «la commune où le loup est réapparu pour la première fois en France».
Puis en 2005, elle a rejoint le zoo de La Palmyre, sans se vouer immédiatement à la cause des gorilles. «C'est l'arrivée en 2005 d'Ybana, jeune femelle née au zoo de Zurich, qui m'a convertie. Je passais beaucoup de temps à observer la façon dont elle s'intégrait avec le couple Bongo et Yola que nous avions déjà. J'ai découvert comment ces grands singes ont chacun leur personnalité. Ybana se montrait vive, curieuse, intelligente.»
Photographe professionnel, Sébastien Meys, l'ami de Florence Perroux, est lui aussi tombé sous le charme. «Avant, je faisais surtout des photos de mer, de voile, de glisse.» Transformé en photographe animalier, il s'est d'autant mieux consacré aux gorilles qu'avec sa compagne, il s'en est allé visiter à peu près tous ceux que les zoos européens possèdent. «Je faisais beaucoup de clichés. Nous dévorions tous les bouquins nous tombant sous la main concernant les singes.»
Une frénésie nuancée d'une grande patience. «Il vaut mieux prendre son temps pour parvenir à de bonnes photos. Les gorilles sont discrets. Leur comportement est assez éloigné de l'image brutale et de la peur qu'ils inspirent. Les petits sont plus vifs mais les adultes sont de doux géants», assure Sébastien Meys.
À La Palmyre, la création de l'espace «grands singes», puis la naissance de deux bébés gorilles, Bangui, fils de Yola en 2009, puis Miley, fille d'Ybana, ont amplifié l'intérêt de Florence Perroux. «Cela faisait plus de vingt ans que le zoo n'avait pas eu de telles naissances.» Cette même année 2009, Florence Perroux et Sébastien Meys ont cassé leur tirelire pour un billet vers les parcs naturels du Rwanda et l'observation des gorilles des montagnes dans leur milieu. «C'était fabuleux. La relation s'inversait. Les gorilles n'étaient plus chez nous mais nous étions chez eux. À peine rentrés, nous ne pensions qu'à repartir.»
Voeu réalisé en 2011, le temps de reconstituer quelques économies. De ces deux voyages, Sébastien Meys a ramené quelques anecdotes: «Un couple d'Américains s'accrochant à ma veste quand ils se sont vus entourés d'un groupe de singes. Heureusement, Florence a émis quelques vocalises d'apaisement», sorte de raclements de gorge appris à force de fréquenter les anthropoïdes du zoo.«À La Palmyre, les femelles réagissent, jamais le mâle.»
Les cordes vocales de la jeune femme n'ont pas la profondeur suffisante pour émouvoir un Bongo de 200 kilos. «Une autre fois au Rwanda, j'ai pris une baffe, reprend Sébastien Meys, un jeune singe qui voulait jouer, certes, mais c'était tout de même une baffe de gorille.»
Le photographe a surtout fait le plein d'images talentueuses que l'on peut découvrir dans l'ouvrage «Gorilles, portraits intimes» (2) sorti cet hiver et qu'il cosigne avec sa compagne. «Ce livre nous permet d'évoquer les dangers que courent ces animaux en voie de disparition.» Le recul de la forêt qui l'abrite affaiblit l'espèce, mais aussi les captures illicites. «Les grands singes sont protégés par la convention de Washington. Ça n'empêche pas certains milliardaires de payer très cher pour disposer d'un bébé gorille dans leur parc privé», s'offusque Florence Perroux, emboîtant le pas de la célèbre Dian Fossey, éthologue américaine spécialisée dans l'étude du comportement des gorilles. «Je ne me compare pas à elle. J'ai juste envie de faire partager mon intérêt pour cette espèce si proche de l'homme génétiquement et en même temps si étonnante, énigmatique. Je ne saurai jamais ce qui se passe dans la tête d'Ybana.»
(1) En restructuration. Réouverture annoncée pour le printemps 2014.
(2) «Gorilles, portraits intimes», Sébastien Meys et Florence Perroux aux éditions Le Pommier, 144 pages, 29 euros.
Source : http://www.charentelibre.fr/2013/02/14/sur-la-piste-des-gorilles,1139495.php