De ornithomedia.com
Le Pygargue à queue blanche est un hivernant rare en France et il a disparu comme nicheur dans les années 1960. Le Balbuzard pêcheur est un nicheur localisé mais en expansion, et il est assez commun en migration.
Les lieux français où ces deux rapaces piscivores peuvent être vus ensemble en été sont très rares : c'est le cas du vaste étang de Lindre (630 hectares) en Moselle.
Le Balbuzard pêcheur y niche en effet depuis 2009 au moins, et plusieurs pygargues (jusqu'à cinq en août 2011) y sont observés tous les mois depuis le début de 2010.
Après une présentation de ce spot très intéressant, Michel Hirtz, chargé des études ornithologiques et des suivis environnementaux dans le Domaine de Lindre, nous en dit plus sur la présence de ces deux rapaces dans cette zone humide.
Le Domaine de Lindre, le spot aux rapaces pêcheursL'étang de Lindre est un plan d'eau artificiel de 620 hectares créé au Moyen-Age. Il s'insère dans un paysage agricole et forestier. Il fait partie du Domaine de Lindre, propriété du Conseil Général de la Moselle.
La principale activité pratiquée est la pisciculture (l'étang est vidé en automne et rempli en hiver) et la chasse y est interdite.
Depuis 1999, le Domaine a décidé de mettre en avant l'intérêt ornithologique du site et de développer l'écotourisme : des équipements ont ainsi été mis à la disposition du public, dont un observatoire (la maison des oiseaux) non loin de Lindre-Basse.
Le point d’accueil de Lindre-Basse est ouvert du 15 juin au 15 septembre du mardi au vendredi de 13h à 17h, et le dimanche et jours fériés de 14h à 18h. Renseignements au 03 87 35 02 80 et sur www.domainedelindre.com.
Une avifaune remarquableLe Domaine de Lindre accueille une faune et une flore très riches : 248 espèces d'oiseaux y ont été notées, 11 espèces d'amphibiens, 19 plantes protégées et 4 espèces de reptiles. Le Domaine de Lindre et la Forêt du Romersberg sont inscrits dans un périmètre NATURA 2000 et bénéficient du label de reconnaissance international RAMSAR.
Les oiseaux constituent la principale attraction du site. En hiver, quand le niveau du lac est élevé, et que l'étang n'est pas entièrement gelé, de nombreux canards plongeurs se rassemblent, dont régulièrement des Garrots à oeil d'or (Bucephala clangula), des Harles bièvres (Mergus merganser) et parfois des Harles piettes (Mergus albellus), mais aussi des foulques, des grèbes, et parfois des plongeons. Des Cygnes chanteurs (Cygnus cygnus) et de Bewick (Cygnus columbianus bewickii) sont parfois présents. Des Oies cendrées (Anser anser) et surtout des Oies des moissons (Anser fabalis) séjournent entre novembre et février.
Des dizaines de Grandes Aigrettes (Ardea alba) et de Hérons cendrés (Ardea cinerea) pêchent le long des berges. Tous ces oiseaux attirent des rapaces : Faucon pèlerin (Falco peregrinus) et parfois le Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla).
Au printemps, les roselières sont le domaine entre autres du Blongios nain (Ixobrychus minutus), du Butor étoilé (Botaurus stellaris) (nidification irrégulière), du Grèbe à cou noir (Podiceps nigricollis), du Busard des roseaux (Circus aeruginosus), de quelques couples de Hérons pourprés (Ardea purpurea) et de Marouettes ponctuées (Porzana porzana) et d'une belle population de Rousserolles turdoïdes (Acrocephalus arundinaceus) (85 comptées en 2011).
Le Canard chipeau (Anas strepera), la Nette rousse (Netta rufina), le Fuligule milouin (Aythya ferina) et le Fuligule morillon (Aythya fuligula) et depuis peu l'Oie cendrée (Anser anser) sont nicheurs. La Cigogne blanche (Ciconia ciconia) est commune. Le Balbuzard pêcheur (Pandion haliaetus) est nicheur depuis 2009 (voir plus bas). Des sternes, guifettes et mouettes passent en avril-mai.
Dans les forêts proches du Lindre (Romersberg et Saint-Jean) niche notamment le Gobemouche à collier (Ficedula albicollis) (lire Chercher le Gobemouche à collier en Lorraine).
A la fin du mois de juillet, des milliers de Fuligules milouins se rassemblent pour muer, accompagnés de quelques Fuligules nyrocas (Aythya nyroca) et Nettes rousses.
Des limicoles variés (dont des milliers de Vanneaux huppés) se rassemblent sur les quelques vasières qui se forment en automne, et le Balbuzard pêcheur et la Cigogne noire (Ciconia nigra) sont de passage. Des milliers de canards de surface (Sarcelle d'hiver, Canard souchet) stationnent. Les Grues cendrées (Grus grus) sont de passage en octobre-novembre.
Mais des raretés et des surprises sont toujours possibles ...
AccèsDepuis Nancy à l'ouest, prendre la N74 / D674 puis la D 38 jusqu'à Dieuze.
Dans le centre du village, prendre la route départementale 999 en direction de Maizières-lès-Vic et à sa sortie, suivre la direction de Lindre-Basse. Traverser le village et garer le véhicule sur le parking. L’accès à la digue, un bon point d'observation situé à deux cents mètres, se fait à pied.
Il y a plusieurs autres points d'observation intéressants autour de l'étang de Lindre : le nouvel observatoire (maison des oiseaux) récemment créé non loin de Lindre-Basse, la presqu'île bien dégagée de Tarquimpol au sud, mais aussi la roselière de la cornée de Guermange, à l'est.
Les Pygargues à queue blanche du LindreLe Pygargue à queue blanche est un très grand rapace (envergure comprise entre 2 m et 2,45 m) à la silhouette massive, aux ailes rectangulaires en vol et à la queue courte cunéiforme. L'ensemble du plumage est brun foncé sauf la tête et la base du cou légèrement plus clairs. Les adultes ont la queue blanche.
Le juvénile est beaucoup plus foncé et le plumage final est acquis en cinq ou six ans. Il ne niche plus en France depuis le milieu du XXème siècle, et c'est un hivernant rare dans le pays.
Le premier oiseau est arrivé sur le Lindre en novembre 2009 : il s'agissait d'un mâle adulte.
En janvier 2010, une femelle immature (probablement de deuxième été) est venue se joindre à lui. Les deux oiseaux ont passé tout l'hiver puis toute l'année 2010 ensemble, y compris durant l'été, parfois à quelques km du Lindre.
En 2011, ils ont commencé à chasser en duo.
Leur plumage, mais surtout la couleur de leur bec a changé : il est de plus en plus jaune, seule la pointe restant encore sombre. La femelle est plus forte et plus grande (d'une tête) que le mâle. Son bec n'est pas entièrement jaune et son plumage est encore moucheté car elle n'est pas encore adulte. Le mâle a le bec entièrement jaune et un plumage uni.
En mai, un début de parade a été observé au-dessus de la forêt de Romersberg. Régulièrement les oiseaux sont observés sur les abords de l'étang. Des chasses sont régulièrement pratiquées sur des Foulques macroules (Fulica atra), des amphibiens mais aussi sur des Fuligules milouins et même sur des poissons, dont de grosses anguilles.
On ne connaît pas l'origine de ces oiseaux car ils ne sont pas bagués. Le meilleur point d'observation est l'observatoire de la maison des oiseaux.
Vers la mi-août 2011, deux autres pygargues (immatures de deuxième été) ont fait leur apparition, et ils sont aussi visibles depuis l'observatoire de la maison des oiseaux.
Les Balbuzards pêcheurs du LindreLe Balbuzard pêcheur est un rapace piscivore noir, blanc et brun de taille moyenne (envergure comprise entre 1,5 et 1,8 m).
En 1999, le Conseil Général de Moselle a financé l'installation de trois plates-formes supportant des nids, mais le 26 décembre de la même année, l'ouragan Lothar a détruit les nids. Les plates-formes ont été réinstallées sur deux gros chênes en bordure d'étang.
Après avoir commencé au cours de l'été 2007 la construction d'une aire sur une plate-forme, un couple de Balbuzards pêcheurs venus d'Allemagne (ils étaient bagués) a tenté de s'y reproduire en 2008, sans succès.
Mais au printemps 2009 est né un jeune qui s'est envolé. L'espèce n'était plus nicheuse en Lorraine depuis environ un siècle ! Le couple s'était installé en avril, l'éclosion a eu lieu le 1er juin et le jeune s'est envolé le 21 juillet. Les oiseaux étaient tous partis le 5 août, ce qui est précoce : il est ainsi possible que le jeune n'ait finalement pas survécu à son envol, car en règle générale, il continue à se faire nourrir sur l'aire pendant quinze jours à trois semaines.
En 2010, deux jeunes sont nés, et en 2011, ce sont trois petits qui ont vu le jour : deux se sont envolés avec certitude, des doutes subsistant pour le troisième.
Ailleurs en France, l'espèce est aussi en expansion, et 60 couples y ont été recensés en 2010.
Pendant la saison de nidification, les Balbuzards pêcheurs sont également visibles (entre autres) aussi depuis l'observatoire de la maison des oiseaux. Aucun conflit avec les Pygargues à queue blanche n'a été constaté.
Les étangs de GélucourtSitué au sud Domaine du Lindre, le village de Gélucourt est entouré de plusieurs étangs piscicoles : bien que chassés, les plus intérressants sont l'étang de Gélucourt et celui de Videlange.