De ornithomédia.com
Les colibris (famille des Trochilidés), que l'on ne trouve que sur le continent américain, sont des oiseaux incroyables : ils comprennent les plus petites espèces du monde (cinq cm pour le Colibri d'Elena), leur métabolisme est le plus élevé du monde animal (leur cœur peut battre jusqu'à 1260 fois par minute), ils peuvent rentrer dans une sorte de torpeur quand la nourriture devient rare, ce sont les seuls à pouvoir voler à reculons, et leurs couleurs irisées sont spectaculaires.
Nous vous présentons quelques-unes des caractéristiques étonnantes de cette famille.Des oiseaux spécialisés
La famille des Trochilidés (colibris) est très riche, avec un nombre d'espèces compris selon les sources entre 319 et 356 (il semble impossible de trouver un nombre officiel). On ne les trouve que sur le continent américain, en particulier en Amérique centrale et du Sud.
Ils sont connus pour leurs fantastiques couleurs irisées qui changent selon l'angle de vision. Ces teintes ne sont pas dues à des pigments mais à la structure des plumes qui présentent des micro-structures diffractant la lumière (lire Cigognes bleues : une couleur à priori improbable naturellement).
Ce sont des nectarivores très évolués, qui dépendent presque entièrement des sucres qu'ils tirent du nectar des fleurs. En fait, 90 % de leur régime seraient composés de nectar. Mais ils ont aussi besoin d'attraper des insectes ou des araignées pour avoir des apports en protéines.
La demande énergétique quotidienne d'un colibri de 4 à 5 grammes est d'environ 30 à 35 kJ. Pour répondre à cette demande, ils doivent consommer le nectar de 1000 à 2000 fleurs chaque jour. Pour cette raison, ce sont des oiseaux très territoriaux.
Les colibris doivent s'assurer de la disponibilité de plantes en fleurs tout au long de l'année. Les espèces nordiques comme le Colibri à gorge rubis (Archilocus colubris) d'Amérique du Nord, doivent donc migrer sur de très longues distances (plusieurs entreprennent même la traversée du golfe du Mexique, volant à basse altitude).
Colibri jacobin (Florisuga mellivora), Pérou
Photo : Marc Fasol
Une anatomie adaptée
Le bec fin, plus ou moins long et plus ou moins recourbé, est adapté à la récolte du nectar. Par exemple, le bec très recourbé du Bec-en-faucille aigle (Eutoxeres aquila) épouse particulièrement bien la courbe de certaines fleurs comme celles de l'Heliconia et du Centropogon. Certaines espèces sont donc très dépendantes de certaines plantes.
Leur langue est particulière : elle est très longue, pour atteindre le fond des corolles, et la quantité de nectar ingérée est directement proportionnelle à la longueur de la langue. Le nombre de coups de langue peut varier entre 3 et 13 par seconde.
Mango à cravate noire (Anthracothorax nigricollis) femelle, Pérou Photo : Marc Fasol
La langue des colibris est en partie cartilagineuse. Elle se sépare en deux branches courbées sur elles-mêmes qui forment deux sillons qui piègent le nectar en se refermant quand l'oiseau rentre son bec.
La structure anatomique des yeux des colibris est semblable à celle des autres oiseaux, mais en plus des cônes sensibles au rouge, au vert et au bleu, les colibris auraient un quatrième type de cône sensible à l'ultraviolet (lire Les particularités de la vision des oiseaux).
Le fait que les colibris se nourrissent du nectar des fleurs exige des performances particulières : leur vol ressemble à celui des insectes. En modifiant l'angle de leurs ailes, ils sont capables de rester stationnaires, d'avancer, de reculer et de se déplacer sur le côté.
Certains colibris peuvent battre des ailes de 12 à 100 fois par minute, et pour cette raison les colibris ont la plus haute demande en oxygène de tous les vertébrés. Pour transporter l'oxygène aux organes vitaux, ils disposent de la plus haute densité de globules rouges, soit environ 6 590 000 par millimètre cube pour le Colibri rubis-topaze (Chrysolampis mosquitus). Au repos, le taux respiratoire est d'environ 300 respirations par minute, mais il peut monter à 500 respirations par minute lors du vol.
Le coeur du colibri représente de 2 à 5 % de sa masse corporelle, alors qu'il compte pour 1 à 3 % chez les oiseaux chanteurs et 0,5 % chez les primates. Il peut battre 500 à 600 fois par minute au repos et jusqu'à 1000 dans des conditions extrêmes.
Inca à collier (Coeligena torquata margaretae) mâle, Pérou Photo : Marc Fasol
Le vol rapide des colibris est facilité par la structure de leur squelette et de leur musculature.
Les oiseaux sont en majorité pourvus de six paires de côtes, alors que les colibris en ont huit, réparties le long d'un profond bréchet et d'un sternum allongé, permettant la fixation de muscles puissants pour le vol. Les bras sont beaucoup plus courts, de telle sorte que 70 % du squelette de l'aile est composé des os de la main. L'articulation supérieure bouge librement à la jonction de l'épaule, permettant des mouvements optimaux dans toutes les directions, incluant des rotations axiales de 180°. La composition des muscles est unique et fait en sorte qu'il se fatigue plus lentement. Les deux muscles de vol comptent pour plus de 30 % de sa masse musculaire, tandis qu'elle se situe autour de 20 % pour les oiseaux migrateurs.
Les colibris ont une très bonne mémoire : ils se souviennent de l'emplacement exact des fleurs qui les ont nourris, mais aussi des moments où celles-ci ont produit du nectar.
Colibri géant (Patagona gigas), Pérou : c'est le goliath de la famille, avec 21,5 cm de long Photo : Marc Fasol
La conservation de l'énergie présente un défi physiologique important pour les colibris. Plus un animal est petit, plus il perd sa chaleur. Cependant, plus il est petit, plus il est facile pour l'énergie d'atteindre toutes les parties du corps et de réguler la température. La température corporelle des colibris est habituellement maintenue entre 40° et 42° C.
Lorsque la température extérieure est basse, les colibris ont recours à des moyens simples, comme la contraction des muscles, pour produire davantage de chaleur. Cependant, ce mécanisme exige une dépense énergétique élevée qui doit être compensée par un apport continuel d'énergie. Ils doivent même accumuler suffisamment de réserves pour survivre au jeûne nocturne.
Pour arriver à survivre aux nuits froides, notamment en montagne, les colibris peuvent entrer en état de torpeur. Durant ces périodes, le rythme cardiaque diminue à 50 battements par minute, et le rythme respiratoire diminue de 50 %
Saphir œnone (Chrysuronia oenone josephinae), Pérou Photo : Marc Fasol
La reproduction d'un liliputien
Lorsque vient le temps de la période de reproduction, le colibri mâle signale sa présence à la femelle par des émissions sonores et des parades aériennes. La forme du vol de parade du mâle est même souvent spécifique.
Les mâles colibris sont polygames, ils s'accouplent avec plusieurs femelles au cours de la saison de reproduction. Ainsi, chez la plupart des espèces observées, le mâle ne s'associe à la femelle que le temps de la copulation.
Le début de la saison de reproduction varie selon les espèces et les régions. En règle générale, le pic de reproduction se produit lorsque les fleurs sont en abondance.
Les nids sont de petite taille et la plupart ont la forme d'une coupe.
Colibri de Mulsant (Chaetocercus mulsant), Pérou Photo : Marc Fasol
Certains sont situés à quelques centimètres du sol, d'autres sont perchés à 10 ou même 30 mètres dans un arbre. Plusieurs colibris décorent les murs extérieurs de leur nid avec des matériaux de camouflage tels que les lichens et les mousses trouvés sur les arbres et rochers. Les nids sont souvent solidifiés à l'aide de toiles d'araignées.
La couvée de tous les colibris est presque invariablement composée de deux oeufs blancs de forme ovale elliptique. Ils sont très petits, à peu près de la taille d'un haricot. Leur poids varie de 0,4 gramme chez les très petites espèces à 1,4 gramme chez le Colibri géant (Archilochus colubris).
Marc Fasol a séjourné deux mois au Pérou au cours de l'été 2011, et il nous a transmis de nombreuses photos
Brillant à front violet (Heliodoxa leadbeateri leadbeateri) femelle, Pérou Photo : Marc Fasol
Sources
- Musée de la nature et des sciences. Colibris - hummingbirds. Musée virtuel.ca. http://www.museevirtuel.ca/Exhibitions/Colibri/Fr/Colibris/index.html
- Alejandro Rico-Guevara et Margaret A. Rubega (2011). The hummingbird tongue is a fluid trap, not a capillary tube. Proceedings of the National Academy of Sciences. Date de mise à jour : 02/05. http://www.pnas.org/content/early/2011/04/27/1016944108.abstract