De laprovence.com
Plus d'un millier de flamants roses ont trouvé refuge dans l'étang du centre ornithologique de Pont de Gau.
Photo Edouard Coulot
Le décompte est certes macabre. Mais il est nécessaire. Les chercheurs de la Tour du Valat sont en train d'établir un recensement des flamants roses victimes de la vague de froid. "À ce jour, nous en avons dénombré un peu plus de 200. La donnée n'est pas exhaustive, il faudra attendre encore quelques jours, mais on devrait être en dessous des 1 000 morts", confiait hier matin Arnaud Bechet, chargé de recherche à la Tour du Valat.
En 1985, le bilan était de 3 000 flamants morts
Livré brut, ce chiffre peut paraître élevé, mais pas pour les scientifiques. "Cette vague de froid est vraiment exceptionnelle. La dernière remonte à 1985. À l'époque on avait dénombré plus de 3 000 flamants morts" ajoute le scientifique. Et encore, il faut mettre cette donnée statistique en perspective avec la population globale de flamants roses qui a littéralement explosé en quelques décennies.
Aujourd'hui on estime en effet la population totale de ces volatiles à environ 30 000 spécimens sur tout le pourtour méditerranéen français . "En 1985, il y en avait 8 000". La mortalité n'avait pas donc mis en danger l'espèce qui s'était adaptée, notamment sur son rythme de reproduction. Pourquoi cette brusque croissance alors que dans les années soixante-dix le flamant rose était un animal rare en France ? Parce que l'homme a pour une fois donné un coup de main à la nature, et notamment la Tour du Valat, en créant des îlots artificiels favorisant leur reproduction.
Un refuge à Pont de Gau
Des flamants roses qui se plaisent visiblement sous nos cieux, d'autant que la bestiole a la caractéristique d'être fidèle : lorsqu'un flamant a choisi d'hiverner dans un endroit, en règle générale, il y revient toutes les années. La semaine dernière, nous avions rendu visite au centre ornithologique de Pont de Gau. Ce jour-là, 16 flamants roses avaient été accueillis et soignés dans l'urgence. "Ce matin (hier donc, ndlr) nous en avons 36. Des particuliers nous en ont encore amenés ces derniers jours, et je pense que quelques personnes qui ont recueilli un oiseau chez eux vont encore en apporter avec le redoux", confie Frédéric Lamouroux.
Mais le plus spectaculaire, c'est l'étang situé derrière le centre qui accueille actuellement plus de 1 000 oiseaux en toute liberté. Les flamants ont ici trouvé un refuge naturel et de la nourriture. L'étang n'a pas gelé grâce à des pompes qui mettent l'eau en mouvement, et les oiseaux sont alimentés. "On a eu une bonne surprise, les dépôts de Saint-Cannat et de Marguerittes de l'entreprise Royal Canin nous ont fait don d'une tonne de croquettes pour chiens", ajoute Frédéric Lamouroux.
Les pensionnaires de Pont de Gau resteront encore au chaud quelque temps
Réhydratée, cette alimentation permet un apport en protéine intéressant. "Le flamant résiste au froid intense, le souci c'est le mistral et le gel, et a fortiori la combinaison des deux. L'oiseau ne peut plus s'alimenter et il devient vulnérable", souligne Arnaud Bechet. Dans ces conditions, les 36 pensionnaires de Pont de Gau resteront encore au chaud quelque temps. "On les mettra ensuite dans un enclos, et il faudra encore laver leur plumage qui est très sale", poursuit Frédéric Lamouroux.
Des plumes sales ce sont en effet des plumes qui ne sont plus imperméables, et donc une porte ouverte au froid. Dans quelques jours, les flamants retrouveront leurs marais, et la Camargue un visage plus accueillant. En espérant que le plus dur est passé.
Jean-Luc PARPALEIX